Il semble qu’une “escadre d’attaque” navale russe soit désormais structurellement établie en Méditerranée orientale, alors qu’il n’y avait jusqu’ici que des présences ponctuelles d’unités détachées notamment vers les bases russes en Syrie. L’escadre reprend le rôle que jouait, jusqu’à la fin des années 1980 et la dissolution de l’URSS, le même type de formation face à la VIème Flotte (Méditerranée) de l’US Navy. Un article de Spoutnik-français sur ce déploiement permet d’avoir quelques précisions sur l’effet de dissuasion du missile de croisière Kalibr, la principale arme d’attaque (mer-mer et mer-sol) dont sont équipés les navires qui composent cette escadre.
L’article rapporte l’analyse de plusieurs experts militaires russes sur cette situation. L’un d’entre eux, Alexeï Leonkov, explique que la menace des Kalibr joue un rôle important sur le déploiement des unités navales de l’US Navy, qu’on a pu constater lors de l’attaque contre la Syrie de la nuit du 13-14-avril. L’US Navy montre une très grande crainte de la possibilité d’attaque de ces missiles de croisière et, en conséquence, déploie ses unités à une distance beaucoup plus grande des objectifs terrestres ponctuels qui sont couverts par l’escadre russe.
Durant cette attaque, les tirs de missiles de croisière Tomahawk contre la Syrie se sont faits de beaucoup plus loin que nécessaire et ont permis un repérage beaucoup plus précoce de leurs tirs et un suivi beaucoup plus précis de leurs trajectoires. Cela a permis aux Russes de donner à la défense anti-aérienne syrienne beaucoup plus de temps et d’informations pour préparer sa riposte et la rendre beaucoup plus efficace( 66 missiles de croisière abattus sur 105 tirés, selon les Russes).
« Les USA ont déjà réagi aux plans de la Russie de déployer des Kalibr en Méditerranée. Le commandant de la marine américaine en Europe et en Afrique, l’amiral James Foggo, a déclaré que les navires américains étaient “prêts à se défendre contre les missiles de croisière russes” mais qu’ils « n’aspiraient pas au conflit ». Cette formule diplomatique standard cacherait une forte préoccupation, voire une crainte.
» “Les Américains n’apprécient pas du tout quand un autre acteur possède des missiles de croisière qui n’ont rien à envier aux Tomahawk, précise Alexeï Leonkov. Les Kalibr représentent une grande menace pour[les navires lance-missiles des classes] Ticonderoga et Arleigh Burke. Je rappelle que les Américains et leurs alliés ont procédé à la fameuse frappe du 14 avril contre la Syrie à partir d’un trou de souris. Pour ne pas se retrouver sous le feu des Kalibr antinavires, ils se sont retirés au sud de la Méditerranée pour effectuer le tir. La position de tir n’était pas favorable, et la durée de vol des missiles était élevée. Cela a permis à la défense antiaérienne syrienne de se préparer et de traiter assez efficacement les cibles.” »