C’est une affaire d’espionnage d’une ampleur jamais vue qui vient de trouver son épilogue aux Etats-Unis. Durant des années, le fabricant américain de téléviseurs Vizio a enregistré tout ce que ses clients visionnaient, pour transmettre ensuite ces données à des régies publicitaires. Ce scandale vient de trouver son épilogue, Vizio ayant été condamné à payer une amende de 2,2 millions de dollars ce début du mois. L’affaire rencontre un écho particulier en ce début 2017, alors que l’essor de la télévision numérique offre potentiellement une mine d’information aux annonceurs.
Vizio a beau vendre ses téléviseurs haut de gamme uniquement aux Etats-Unis, l’affaire concerne tout de même 11 millions de téléviseurs mis sur le marché. Selon le «Los Angeles Times», la marque américaine détenait, en 2016, 20% du marché de la télévision aux Etats-Unis. Basé à Irvine, en Californie, le fabricant avait mis en place une stratégie industrielle pour espionner les habitudes de ses clients. Dès 2014, Vizio met sur le marché des téléviseurs intelligents capables de savoir, seconde après seconde, ce qui était affiché à l’écran, que ce soit des chaînes de télévision reçues via le câble, des vidéos achetées à la demande, des DVD ou du contenu acquis en streaming, selon la Federal Trade Commission (FTC), l’organisme de régulation des télécoms aux Etats-Unis.
Ainsi, chaque jour, le fabricant récoltait des millions de «points» sur les écrans des téléviseurs, qu’il lui suffisait de comparer avec des bases de données pour savoir ce que regardaient chaque jour ses millions de clients. Ensuite, ces données étaient fournies à des agences de publicité en y ajoutant des informations démographiques: sexe, âge, revenu, statut marital, taille du ménage, niveau d’éducation, etc. Couplées à des données IP – soit en quelque sorte l’adresse internet de la maison –, ces informations permettaient ensuite d’offrir des publicités ciblées à ces foyers, par exemple sur les ordinateurs ou les smartphones se trouvant dans le ménage.
Le reproche principal adressé au fabricant est de ne pas avoir averti ses clients de ses pratiques. Jusqu’à présent, les données sensibles telles que définies par la loi concernaient des éléments liés à la finance et à la santé. «Pour la première fois, la FTC déclare dans une plainte que l’activité individuelle télévisuelle est une information sensible», a affirmé la présidente par intérim de la FTC, Maureen K. Ohlhausen.
Déjà en février 2015, RFI rapportait dans un de ses articles; qu’il ne faut pas parler de choses trop personnelles ou trop sensibles devant votre télévision, parce que celle-ci vous écoute ! » C’est en substance l’avertissement que Samsung, le géant sud-coréen de l’électronique, a adressé cette semaine aux acheteurs de ses « smart TV », ces télés connectées en permanence à Internet. Un avertissement qui suscite une très forte controverse au sujet de la protection de la vie privée.Comment une télé peut-elle écouter les conversations ? Ces « smart TV» sont des modèles haut de gamme de Samsung qui disposent d’une fonction de commande par la voix. L’utilisateur peut, par exemple, demander à voix haute à sa télé de changer de chaîne, d’augmenter le volume ou encore de chercher un bon western sur Internet.
Elles enregistrent donc les sons autour d’elles, puis les envoient vers des serveurs extérieurs, où des logiciels vont retranscrire ces voix sous forme de texte et les interpréter. Un travail qui est effectué par des entreprises tierces.
Des conversations privées enregistrées : Dans sa charte de confidentialité, Samsung prend les devants et avertit donc ses clients : « Sachez que si vos paroles contiennent des informations personnelles ou sensibles, elles seront incluses dans les données capturées et transmises à une partie tierce ». Cet avertissement fait froid dans le dos. On imagine déjà la télévision écouter confidences, disputes de couple ou encore le numéro d’une carte de crédit. Ces « smart TV » rappellent le célèbre « télécran », un appareil qui permet d’espionner la vie intime de chacun, imaginé par l’écrivain George Orwell dans son roman 1984.