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Eh ben c’est l’“Âge du Désordre”!

L’équipe d’analystes de la Deutsch Bank (DB) a conclu, dans un rapport circonstancié et hautement considéré, à ce que tout le monde sait ou devrait savoir dans tous les cas, mais qui jusqu’ici n’a pas être affirmé de façon si claire, à un tel niveau et dans un tel milieu. La globalisation est morte, est-il annoncé, et nous entrons dans l’‘Âge du Désordre’. Les quarante années que l’on pourrait désigner comme les ‘Quarante-Simulacre’ depuis 1980, avec le couple Thatcher-Reagan en ouverture de la grande cavalcade, sont terminées parfaitement à l’heure. On conviendra que calendrier est conciliant et arrangeant, et surtout il est symboliquement complice comme s’il voulait nous faire passer un SMS ou un texto des dieux. “Ce qui avait commencé en 1980, nous disent nos informateurs divins, se termine en 2020, ce qui nous fait effectivement quarante ans tout rond”.

Il n’empêche… Même s’il répète des évidences qu’il est difficile d’écarter malgré tous les moyens faussaires et de simulacre dont nous disposons, il reste que le rapport de la DB montre un remarquable pessimisme pour un travail prospectif d’une telle organisation. Plus encore, le fait de le rendre public rend compte sans aucun doute de l’intensité de ce pessimisme : la DB veut faire savoir dans quelle humeur sombre et noire elle se trouve, et il est bien probable qu’elle rencontre ainsi une humeur généralisée.

Ci-dessous, voici le texte complet (traduction et adaptation) de RT-com sur le rapport, qui en communique les principaux aspects. Non seulement le rapport constate la fin de la globalisation (et non ‘mondialisation’), mais en plus il expose ce qu’il juge être les principales tendances qui caractériseront l’époque qui va suivre, – celle qui est désignée comme l’“Âge du Désordre”. Il s’agit d’un rapport de situation autant que de prévision, et cela parce que jamais sans doute la situation présente, à cause de ses avatars crisiques inattendu et la rapidité des événements qui sont tous également de nature crisique, n’a autant bouleversé les prévisions et ne les autant maîtrisées aux dépens des opérateurs humains.

« L’ère de quatre décennies de globalisation touche peut-être à sa fin, et nous pourrions entrer dans “l’Âge du Désordre”, qui va remodeler à la fois les économies et la politique, estiment les analystes de la Deutsche Bank dans leur dernière analyse.
L’une des principales caractéristiques de ce nouvel Âge sera la fin de la globalisation sans entraves, a prédit l’équipe d’analystes dirigée par le stratège Jim Reid. Alors que nous avons connu “la meilleure croissance combinée des prix des actifs de toutes les époques de l’histoire, avec des rendements d’actions et d’obligations très élevés dans tous les domaines” depuis 1980, “l’Âge du Désordre” va probablement briser cette tendance.
La détérioration des relations entre les États-Unis et la Chine est un autre thème (sur huit) qui définira la prochaine ère distincte dans les temps modernes, ère “qui est accélérée, mais non causée par la pandémie”. Les analystes notent que l’économie chinoise comblera l’écart avec les États-Unis et pourrait finalement les dépasser d’ici la fin de la décennie.
“Un choc des cultures et des intérêts s’impose donc, d’autant plus que la Chine se rapproche de la première économie du monde”, selon le rapport.
Heureusement, il est peu probable que cette impasse économique déclenche un véritable conflit militaire entre les deux États, comme cela se produit généralement lorsqu’une puissance montante tente de contester celui qui est au pouvoir. La guerre économique, – droits de douane, sanctions, cyberattaques, – se poursuivra au contraire, estiment les analystes. Quel que soit le vainqueur de l’élection présidentielle de 2020 aux États-Unis, le fossé entre les deux superpuissances va se creuser.
Alors que la crise du coronavirus a déjà mis l’économie européenne à la croisée des chemins, la Deutsche Bank affirme que la prochaine décennie pourrait devenir “une décennie décisive pour l’Europe”. Parmi les autres facteurs définissant l’avenir, on peut citer l’augmentation de la dette et la généralisation de la distribution d’argent cash au public (technique inaugurée par Bernanke, dite des “billets de banque largués d’hélicoptère”), – des politiques nettement inflationnistes.
Les inégalités pourraient même s’aggraver dans le monde de l’après-Covid-19, avant qu’un retournement de situation ne se produise, selon la banque. L’inégalité est étroitement liée au fossé intergénérationnel, mais les analystes s’attendent à ce que le nombre de jeunes électeurs dépasse celui des personnes nées avant 1980 d’ici la fin de la décennie. Cela pourrait entraîner des changements politiques majeurs dans de nombreux domaines, de la politique des prélèvements à la politique écologique.
“Un tel changement dans l’équilibre des pouvoirs pourrait inclure un régime fiscal plus sévère pour les héritages, moins de protection des revenus pour les retraités, plus d’impôts sur la propriété, ainsi qu’une augmentation des impôts sur le revenu et sur les sociétés… et des politiques plus redistributives dans tous les domaines », selon le rapport de la Deutsche Bank.
Enfin, les dix prochaines années montreront si la hausse exponentielle de la valeur des entreprises technologiques en valait la peine. Elles vont soit déclencher une révolution technologique, soit être la deuxième bulle Internet. »

Pour notre compte, et sans disposer de la moindre équipe d’experts de calibre de ceux qu’emploie évidemment la Deutsch Bank, nous avions noté (avec une avance certainement un peu déloyale parce que due à notre seule conviction) quelque chose de nouveau du côté de la globalisation.

(Nous insistons toujours sur l’emploi du terme ‘globalisation’ qui est approprié pour cette situation, alors que le terme ‘mondialisation’ ne l’est pas. Nous nous demandons toujours pourquoi les Français, qui disposent d’une des très rares sinon de la seule grande langue véhiculaire à disposer des deux termes, n’en usent pas d’une façon adéquate, qui expose crûment les caractères des idéologies concernés, – ou bien peut-être et au contraire, ceci explique-t-il cela.)

Nous mettions l’accent de façon beaucoup plus décisive sur le phénomène Codiv19, qui constitue une démonstration en malfaisance et temps réels, des travers catastrophiques de la globalisation. Selon nous, en effet, le Codiv19 n’est pas seulement catastrophique pour ses effets sur l’économie, il l’est au départ par la façon dont il démontre combien la globalisation accélère et dramatise d’une façon décisive le phénomène de la diffusion des événements catastrophiques. En même temps, cette rapidité et cette volatilité empêchent la moindre stratégie de prévention et précipite les directions politiques dans des situations hyper-défensives, sinon de grande panique, rendant quasiment impossible une réponse adéquate et efficace.

Par ailleurs, oui et bien sûr, la crise qui donne un coup fatal à la globalisation a largement mûri avant Cofdiv19, mais pour des raisons beaucoup plus générales, dépassant tous ces domaines. Il s’agit alors des phases préparatrices et initiales de la Grande Crise d’Effondrement du Système (GCES).

…Quoi qu’il en soit, ainsi écrivions-nous le 3 mars 2020, confiants dans nos propres analystes, émanant en fait des suggestions des dieux qui constituent (les dieux) nos sources principales :

« Ainsi en vient-on à la quatrième période, notre quatrième Temps Crisique,  du tournant précis des deux décennies et notre entrée dans nos Roaring Twenties du XXIème siècle. Avec le recul de quelques semaines, cette nouvelle décennie apparaît comme une rupture formidable et absolument naturelle, comme une tension trop forte qui se rompt avec quelle brutalité ! Et s’ouvrent effectivement nos “Vingtièmes rugissantes”, comme les marins des légendes d’antan baptisèrent les mers furieuses entre les “Quarantièmes rugissants” et les “Cinquantièmes hurlants” des latitudes correspondantes vers le Sud extrême des étendues glacées où jamais le vent ne s’arrête de souffler et la mer de déferler, où les marins disent qu’au-delà vers l’au-delà du Sud Dieu n’est plus.
J’ai tenté de dire tous les événements formidables caractérisant ce passage à 2020 mais, après tout, on pourrait me dire qu’il ne s’agit que  de quelques crises monstrueuses de plus, et là rien de vraiment nouveau, je veux dire ontologiquement, dans un temps qui est crisique par définition. Pourtant non, un événement colossal sans nul doute, ontologique lui, bien que dans le domaine de la perception, – c’est la fin du rêve de la globalisation, – la fin de la globalisation comme rêve de notre avenir. 
Ce poison s’est instillé partout et partout vous le sentez progresser, ce doute terrible face à cette globalisation, laquelle est l’évidente coupable de la crise-Covid-19 qui nous dévaste psychologiquement en faisant entrevoir les mécanismes de l’effondrement, d’une économie-monde qui se défait comme un Meccano mal vissé, qui bascule comme une portée de dominos en rang d’oignons, inarrêtable, inéluctable. Il se dit que le virus envahit notre monde-globalisé par ce qu’il y a de plus globalisant, de plus post-postmoderne, la très-pollueuse et très-luxueuse aviation de transport civil qui relie les capitales, les continents et les régions les plus lointaines, dans le vrombissement élégant des Airbus faisant la courte échelle au virus d’un aéroport l’autre (les Boeing, c’est moins sûr, on sait pourquoi, et Covid-19 s’en méfie comme de la peste si j’ose dire).
 Il me semblerait même que cela (le rêve fracassé de la globalisation) explique la folie qui a transformé Washington D.C. en “D.C.-la-folle”, tandis qu’apparaît le second événement qui marque cette rupture rugissante… L’outil fantastique de puissance, qui semblait au service de la globalisation, qui chaque jour la trahit un peu plus ! Le système de la communication triomphant signe son empire sur le monde en apparaissant comme un Janus qui poignarde la globalisation dans le dos, répandant partout les alertes et les fantasmes de Covid-19, remplaçant le chaos de 2014-2015 par l’attaque de la contagion, cette Grande Peur des Ancien Temps retournée contre la globalisation de l’hypermodernité elle-même… »

On peut couper la tête

Comme on peut le lire dans notre texte, il n’est donc pas question de prévisions sinon le constat de la fin de la globalisation par une sorte de “coup d’État” du Covid19, démontrant les circonstances catastrophiques qu’installe la globalisation en cas de catastrophe impliquant sa transmission mortelle. Pour notre compte, nous allons nous servir de la prospective de la DB, qui pour la critiquer, qui pour développer certaines de nos conceptions que l’analyse renforce.

Nous maintenant que le choc du Covid19 était nécessaire pour tuer la globalisation, au lieu d’accepter l’observation purement technique et financière du rapport de la DB, selon laquelle l’“Âge du Désordre” (fin de la globalisation) a été « accéléré, mais non causé par la pandémie ». Nous ignorons complètement et même émettons quelques doutes sur l’hypothèse que les événements auraient tout de même pris cette tournure, même si Covid19 n’était pas intervenu ; nos doutes viennent du constat que nous faisions auparavant, tant était grande et puissante la réticence à admettre des menaces contre la globalisation dans les milieux financiers où règne la religion de l’ultra-libéralisme. D’une certaine façon, on peut dire que c’est par tous les moyens, au moins depuis la crise de 2007-2008, que la globalisation est soutenue “de force” en activité, pour satisfaire au bréviaire ultra-libéral.

L’intervention de Trump, avec son unilatéralisme affiché, n’a fait que mettre en évidence ce qu’a réellement été la globalisation, – selon le principe, utilisé depuis 1945 et peut-être même depuis 1918, des USA qui nous dit que “ce qui est à moi est à moi, ce qui est à vous est négociable”. La globalisation a été constamment dès les origines, un processus (dit de ‘libre-échange’) constamment à l’avantage des USA, avec la force pour faire pression ou faire chanter les autres, et au désavantage de ces “autres” (les membres ‘Junior’ du club du ‘Monde Libre’ devenu ‘Bloc-BAO’).

Trump n’a fait que dire tout haut ce que les USA ont toujours fait tout bas, derrière des discours ronflants et hautement moralisateurs, et il a de ce fait mis en évidence les fragilisation accélérée et la décadence des moyens de pressions des USA sur les autres. Covid19 est venu mettre tout le monde d’accord en tranchant dans le vif, par un fantastique coup d’arrêt à l’économie, et la mise en balance sinon en danger d’extinction d’activités aussi fondamentales et globalisatrices que le tourisme et les transports d’agrément (naval notamment), le transport aérien et l’industrie aéronautique, etc. La cerise sur le gâteau du Covid-19, c’est bien entendu son extrême imprévisibilité (s’arrêtera-t-il ? Quand s’arrêtera-t-il ?) et l’espèce de paralysie à prévoir des directions politiques devant la décision de déclarer terminée la pandémie.

Effectivement, l’analyse de la DB prend évidemment en compte ce désastre extraordinaire sans en détailler la cause mécanique irrésistible (le Covid-19) ni ce que cette cause a de résiliente dans la mesure où nul n’en connaît ni la durée, ni l’issue, ni la façon réellement de la contrôler, ni les effets à moyen et à long terme aux niveaux social, sociétal et psychologique. Dans ce cadre, la seule chose d’assurée dans ce rapport, c’est le titre qui lui est donné (l’“Âge du Désordre”), car c’est bien de cela (du désordre) qu’il s’agit, et d’ores et déjà dans le chef des diverses directions-Système. 

Un facteur qui apparaît de plus en plus, même s’il n’est pas défini de la sorte (sauf par le titre, justement), c’est qu’il n’y a pas un ‘ordre international’ qui en remplace un autre. La prééminence de la Chine est de plus en plus sérieusement affirmée, mais elle n’aboutit absolument pas à un simple changement de leadership, ni même à une stabilisation  du type bipolaire, voire multipolaire. Il apparaît évident, selon ce qui est détaillée sans que les conséquences de tous ces détails soient analysées d’un point de vue holistique, que les USA refuseront absolument l’affirmation de la Chine et qu’ils continueront plus que jamais à conduire une guerre économique et à contester toute tentative de mise en ordre qui ne les placerait pas en première et incontestée première place ; c’est-à-dire qu’ils continueront à produire du désordre, si eux-mêmes n’y sombrent pas les premiers…

En effet et là-dessus, on observe bien sûr l’absence dans la prospective de prise en compte marquante des événements intérieurs. Il ne suffit certainement pas, aujourd’hui, d’écrire : « Quel que soit le vainqueur de l’élection présidentielle de 2020 aux États-Unis, le fossé entre les deux superpuissances va se creuser » ; il faut surtout se demander si l’élection se déroulera d’une façon qui permettra de déterminer un vainqueur, et si ce vainqueur pourra  assumer son mandat. Cette sorte d’interrogation pourrait d’ailleurs affecter nombre d’autres puissances, tant la véritable question que soulève la prospective est celle de l’ordre public par rapport à des citoyens dont plus personne ne peut plus assurer qu’ils se tiennent dans le cadre politique, c’est-à-dire démocratique, ni qu’ils n’évoluent pas vers le le risque d’une explosion ou d’une sorte d’insurrection. A cet égard, l’“Âge du Désordre” est plutôt une perspective d’abord intérieure, ce que n’aiment pas vraiment les experts et analystes des prospectives de la situation générale.

La question centrale revient donc à se demander si les directions politiques et financières actuelles, selon leurs organisations, selon les psychologies régnantes, selon le système de la communication tel qu’il fonctionne, ont encore leur place là où elles se trouvent, si elles sont en réelle position de capacité. Si la réponse est négative, comme nous serions tentés évidemment de le penser, alors l’“Âge du Désordre” serait comme un canard à qui la tête n’aurait plus aucune utilité, donc ce serait une situation qui conduirait les mécontents et les furieux à juger préférable qu’on lui coupât la tête. On sait que certains continuent à marcher lorsqu’ils sont privés de leur tête, et ce pourrait être après tout le cas.

En réalité, la seule précision-prévision du rapport de la DB qui nous paraisse intéressante, par ce qu’elle dit de la confiance des élites (dont font partie ces experts-DB) dans l’avenir technologique (du technologisme), c’est l’incertitude qu’elle avoue quant à l’avenir des technologies dont les promoteurs nous disent constamment qu’elles sont destinées à changer l’homme, le cosmos, le monde, Dieu éventuellement (voir le transhumanisme et tout ce qu’il nous annonce) ; eh bien le rapport envisage que cela puisse également et tout simplement se terminer ‘en bulle’ :

« Enfin, les dix prochaines années montreront si la hausse exponentielle de la valeur des entreprises technologiques en valait la peine. Elles vont soit déclencher une révolution technologique, soit être la deuxième bulle Internet. »

Cette observation rattrape toutes les autres en nous découvrant implicitement un aveu de taille, et qui est certainement une nouveauté importante. Elle nous dit rien de moins que l’extraordinaire pression exercée par les lobbies et les diverses capacités d’influences du technologisme sur les dirigeants et les financiers est désormais insuffisante à emporter une adhésion aveugle et sans condition. Il s’agit là d’une révélation qui, à notre sens, est imputable indirectement à l’effet de la crise du Covid19 ; c’est-à-dire la crise des médecines, des laboratoires, etc., de tout ce qui est technologie (scientifique) dans un domaine donné (sanitaire), et qui s’avère impuissant, aussi bien mécaniquement que psychologiquement, à s’affirmer face à un processus ‘naturel’ (qu’il soit ou non d’origine ‘naturelle’, l’essentiel étant d’admettre que le processus, lui, l’est).

Cette dernière faille, accompagnant un rapport qui fait état de si grandes faiblesses et de si terribles reculs (déroute de la globalisation, crise des USA, effondrement des structures de l’ordre international), nous donne une précision que nous jugerons fort précieuse. Elle nous dit finalement combien la classe dirigeante dans son sens le plus large, celle qui se trouve au service du Système et qui justifiait avec un grand brio la poursuite des stratégies suivies tout en profitant des privilèges afférents à cette position, se révèle désormais être dans un état de défiance et de pessimisme extrêmement grand, malgré tous les complots qu’on prête à ses opérateurs pour expliquer qu’ils dirigent la manœuvre de main de maître.

Source: DDE

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